Selon les indications publiées sur les sites du Figaro[1] et du Monde[2] la lettre de démission que Carlos GHOSN aurait adressée à Renault était, partiellement, formulée ainsi : “Il va sans dire, sans pour autant que ceci constitue une condition de la fin de mes mandats, que l’intégralité de mes droits tels que reconnus dans les documents sociaux et par la loi sera préservée.”
On le voit, il s’agit de termes murement réfléchis et choisis. Vu les qualités de gestionnaire de l’intéressé et la qualité des avocats qui l’entourent depuis le début de sa période de disgrâce on ne pouvait d’ailleurs s’attendre à moins.
Du point de vue technique, les praticiens de la rupture des contrats de travail s’accorderont sans doute à penser (si ce n’est à écrire) que ces termes sont même particulièrement bien choisis car ils permettent de démontrer qu’alors même qu’il adressait sa démission, Carlos Ghosn, n’entendait pas perdre les avantages liés à son contrat de travail logiquement perdus en cas de démission, ce qui peut paraître contradictoire et qui est, à tout le moins, équivoque. C’est sans doute précisément ce que souhaitait Carlos Ghosn car la chambre sociale de le Cour de cassation rappelle régulièrement que, pour être jugée valable, une démission doit être claire et non équivoque.[3]
En l’espèce on est loin du compte…
Il semble que Renault a considéré pouvoir se satisfaire d’une « démission » rédigée en ces termes et en a tiré des conséquences préjudiciables pour Carlos Ghosn qui se serait retrouvé privé, entre autres avantages et bénéfices, de la retraite surcomplémentaire souscrite par l’entreprise pour son compte.
Il semble cependant que l’entreprise Renault n’a pas été très prudente car le risque existe pour que les juges requalifient la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse de sorte que Carlos Ghosn pourrait prétendre au paiement de tous les avantages dont sa « démission » l’aurait privé. L’addition pourrait être salée.
Même si l’affaire prud’homale qui commence n’est qu’une affaire dans l’affaire elle n’est pas inintéressante car il semble que Monsieur Ghosn a de bonnes chances de succès.
Affaire à suivre donc…
[3] Pour une illustration récente : 5 juin 2019, n° de pourvoi: 18-12785